“Je n’ai jamais mentionné que j’étais mal à l’aise et exprimé mes souffrances parce que je pensais que cela allait créer beaucoup plus de dommages. Et finalement, j’ai fait une enfance où l’on m’a complètement ignorée.”
“Je pense parfois que ma mère est une personne faible qui ne peut pas s'en sortir sans moi, que je dois me sacrifier pour elle et que je dois être présent à tout moment pour elle. Je dois m'inquiéter et arrêter de vivre, car ma mère ne vit pas. Cependant, je sais qu'au fond de moi tout cela est faux. Mais, je ne peux pas faire autrement. Mon énergie est focalisée et me guide dans cette voie du sacrifice et de la souffrance perpétuelle. Je ne vis plus pour moi, mais pour ma mère.”
“À la maison, je commence à remarquer des choses bizarres chez ma mère. Quand je me lève le matin pour aller à l'école et que je dois me préparer, elle n'est pas encore réveillée où elle n'est tout simplement pas à la maison. Je m'inquiète encore et encore pour mes parents. Quand ma mère est à la maison lorsque je me réveille elle ne s'occupe pas de moi, elle ne se prépare pas pour aller au travail. C'est de plus en plus fou l'atmosphère dans cette maison et je n'ose pas poser de questions. Je vois ma mère parler toute seule dans le salon en écrivant sur des petits bouts de papier et puis les fixer au mur. Je ne comprends pas, mais cela m'effraie beaucoup. Je lui demande ce qu'elle fait sans vraiment être intéressée par ses affaires mais plus pour essayer de capter son attention. Je sens que je suis de trop dans cette pièce et que je dois trouver une solution pour me sentir plus en confiance. Est-ce que ce sont les coups portés par mon père qui font que ma mère est une personne qui perd la tête ? Ce genre de raisonnement et de questions sont bien présents dans mon esprit et cela de plus en plus fortement. À l'âge de 10 ans, je ne reconnais pas ma mère. Qui est cette personne qui ne me regarde pas dans les yeux quand je lui parle? Pourquoi elle parle toute seule dans le salon toute la nuit de manière agressive ? Personne n’est là pour moi ! ”
“Ma mère est à l'hôpital psychiatrique. J'ignore si je dois me sentir soulagé ou encore plus préoccupé. Depuis plusieurs semaines, son état se dégradait. Au téléphone lorsqu'elle me répondait et qu'elle n'avait pas débranché son téléphone je la sentais agacée comme si ça n'était jamais le bon moment pour l'appeler. Et puis elle ne me reconnaissait parfois pas, me l'obligeant à lui répéter “mais oui maman c'est moi “ d'une toute petite voix qui n'en croit pas ses oreilles. Est-ce bien vrai ? Je suis en train d'essayer de convaincre ma mère qu'il s'agit bien de moi, son fils, au téléphone. Un état de panique me saisit en sentant qu'elle ne me croit pas. Elle commence à me vouvoyer et ça confirme le pressentiment que j'avais depuis des jours, des semaines ou même des mois : je ne sais pas qui est cette maman !”
“Ce jour-là, j'avance en direction de l'hôpital psychiatrique où je vais rend revisite à ma maman, ou plutôt où je vais là où je me sens devoir aller. C'est mon rôle ! C'est ma tâche ! C'est mon devoir d'aller dans cet hôpital psychiatrique rendre visite à ma mère ! Il est impensable pour moi de me dire, alors que ma mère est dans cette prison médicalisée, que je peux aller jouer au basket, que je peux avoir des amis, que je peux rigoler et que je peux sourire, où je peux être tout simplement un enfant de 13 ans qui s'occupe de ces petits problèmes d'enfants de 13 ans. Impossible ! Je trahirai ma mère et je deviendrai le même que tout le monde autour d’elle. Je serai contre elle et l'abandonnerai à son triste sort. Je dois être là pour elle, et donc… Je ne peux pas être là pour moi !”